L’Association de la presse judiciaire (APJ) prend acte de la décision de la cour d’appel de Bordeaux, qui a annulé jeudi la procédure ouverte par le procureur de Nanterre Philippe Courroye en pleine affaire Bettencourt, afin d’identifier les sources de journalistes, protégées par la loi du 4 janvier 2010. Trois journalistes du quotidien Le Monde étaient alors ciblés, après la publication d’un article décrivant une perquisition au domicile de Liliane Bettencourt. Huit mois plus tard, des juges indépendants rappellent à un procureur, soumis à l’exécutif, qu’on ne peut violer impunément la loi. Dans son arrêt, la cour d’appel de Bordeaux reprend les principes édictés par la Cour européenne des droits de l’Homme: la protection des sources est « la pierre angulaire de la liberté de la presse dans une société démocratique » et « le droit des journalistes à taire leurs sources ne saurait être considéré comme un simple privilège (…) mais représente un véritable attribut du droit à l’information ». Surtout, elle rappelle utilement aux autorités un point essentiel : la loi de janvier 2010 prévoit que seul « un impératif prépondérant d’intérêt public » justifie une violation des sources de presse. En outre, cette mesure doit être « strictement nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi ». Deux conditions essentielles qui ont fait défaut dans cette procédure. Si cette décision est de nature à rassurer les journalistes, notre association craint que ce rappel à l’ordre, aussi salutaire soit-il, ne soit pas suffisant. L’APJ continue donc de réclamer l’abrogation de la loi de janvier 2010 qui ne prévoit aucune sanction pour ceux qui la violent. Plus que jamais, nous demandons un texte consacrant véritablement le secret des sources. Car les protéger, c’est assurer la liberté d’informer.